Monique Mukuna :  »Seule la combinaison études – expérience – volonté politique peut changer la configuration d’une Nation ( Interview exclusive)

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LIBERTÉ PLUS : Vous avez émis des doutes sérieux autour de la gratuité de l’Enseignement de base en RDC. Votre position a-t-elle évoluée après la clôture de la table ronde à ce sujet organisée par le ministère de la tutelle ayant consacré formellement cette gratuité ?
MONIQUE MUKUNA : Il ne s’agit pas d’une position personnelle, mais de bon sens.
Lorsqu’un pays est qualifié de pauvre – pour rappel, la RDC est 2ème sur la liste mondiale de pauvreté-cela signifie que les indices humains, économiques sociaux etc, sont ceux d’un pays pauvre.
En d’autres termes, pour qu’un pays dit “pauvre” puisse avoir ses écoles primaires et élémentaires gratuites, il doit se faire aider (à défaut de ressources budgétaires) car l’éducation n’est pas source de recette ni à court, ni à moyen terme.
Donc, pour se faire aider, des réformes doivent être entreprises pour être éligible à la remise de dette par les institutions financières internationales, et cela est impossible en deux semaines.
Déclarer que l’école primaire est devenue gratuite, devrait être accompagné d’une annonce de la source de son financement.
Dans le cas d’espèce, évoquer une taxe additionnelle comme proposée par la commission afin de palier au manque de financement est tout simplement irresponsable pour un pays dont le revenu journalier s’élève à moins de 1 dollar.
Non seulement la gratuité de l’enseignement primaire dans les établissements publics est constitutionnelle (article 43 de notre Constitution), mais elle est aussi le souhait de tous quand elle n’accentue pas plus qu’il n’en faut le déséquilibre macro-économique matérialisé par la carence en production de richesse face à des dépenses surdimensionnées, comme c’est le cas actuelle de notre pays.
Question: Vous avez salué la publication du gouvernement en souhaitant un mandat fructueux à l’équipe gouvernementale, mais dans votre dernier tweet, vous demandez la publication des CV de chaque ministre, quel est sens de votre démarche et quelle en sera vraiment l’importance ?
Réponse : Il n’y a aucune contradiction entre saluer la nomination du gouvernement et avoir des attentes élevées en terme de profil pour cette nouvelle équipe. Comme vous le savez, notre travail à l’international nous amène à côtoyer différentes sommités.
Le premier réflexe que nous avons, pas seulement nous, mais tous ceux qui vivent en phase avec le monde présent, est de « Googliser » les personnes.
Or, seuls 20% des membres de l’équipe gouvernementale sont répertoriés sur le net.
Le reste ont travaillé, pour certains, il y a 30 ans, d’autres, à peine dans le privé…
Leur seul mérite est d’être dans un parti de coalition.
Les congolais(e)s ne vont pas mettre dans leurs assiettes ni CACH, ni FCC, ni leurs alliés, mais veulent bénéficier de l’expérience éprouvée d’une équipe.
Quel est le message transmis aux jeunes et aux étudiants ?
Que ni les études, ni l’expérience n’ont leur place dans le développement de notre pays et qu’il n’y a que le fanatisme et le djalelo qui paient ?
Pourquoi vouloir rendre l’école gratuite quand au final, elle ne forme pas l’élite dirigeante ?Pourquoi avoir un CV pour travailler dans des établissements et sociétés privées, dans les administrations, et en faire fi pour la gestion de la chose publique ?
La réponse habituelle est que les intellectuels plein de diplômes n’ont rien fait pour le pays…
Quel illetré ou quel dénué d’expérience a réalisé quelque chose pour la Nation ?
Seule la combinaison des études – qui donnent des outils, et de l’expérience – gage de pratique, de distance et de hauteur, ainsi que la volonté politique peuvent changer la configuration d’une Nation.
Question : La plupart des ministres qui ont été nommés n’ont pas exercé des hautes charges de l’État dans le passé. Cela peut-il constituer un élément de taille pour ne pas croire à la performance de l’actuelle équipe gouvernementale ?
Réponse : J’ai lu quelque part que l’on ne peut pas diriger un pays par la foi.
Même une vie chrétienne est faite d’épreuves pour élever et responsabiliser, à savoir répondre de ses actes.
Cette équipe est formée de bons membres de partis qui vont lever des cotisations pour leurs maisons-mères, afin de préparer les prochaines élections.
Cependant, force est de constater que même des compagnies sérieuses peuvent hésiter à leur confier des postes des décisions .
Je suis juste pragmatique et objective.
Je les félicite encore pour leurs nominations et ils ont mon respect pour leurs fonctions, en même temps, je demeure lucide.
Tous ceux qui sont clairvoyants ont saisi que l’on a pas souhaité placer des gens pouvant être un danger potentiel ou un concurrent pour les prochaines échéances électorales.
Question : Certains politiques pensent que c’est l’ex président, Joseph Kabila, qui continue de diriger le pays. Partagez-vous cet avis?
Réponse : Très cher Liberté Plus, de qui l’exécutif est-il composé ?
Qui a la majorité de l’exécutif ? Qui a la majorité du Parlement ? Cet arrangement FCC – CACH est un secret de polichinelle.
La RDC est réduite à des arrangements.
Je crois fort en la dynamique énergétique qui veut que le temps soit le meilleur justicier.
Il y a eu trop de morts, de martyrs pour qu’un si grand pays reste longtemps prisonnier du bon vouloir de quelques-uns. Nous ne mourrons pas avant d’avoir vu et vécu la délivrance de notre Nation.
Question : Le candidat malheureux de la dernière présidentielle dans le pays, Martin Fayulu a récemment mis en place une structure pour intensifier sa lutte accès sur la recherche de la vérité des urnes avec comme slogan:  »Trop c’est trop libérons-nous ». Quel est vôtre pronostic à ce sujet ?
Réponse : Votre question prête à sourire. Monsieur Fayulu devrait plus s’en prendre à Monsieur Bemba plutôt qu’à Kabila ou à Tshisekedi…
Monsieur Bemba est arrivé directement de la CPI et n’a sollicité l’avis ni le conseil de qui que ce soit.
On a laissé une énorme foule d’accueil se former autour de lui pour crédibiliser le processus électoral, alors que tous les postulants à la présidentielle, dont moi-même, hésitions à déposer l’acte de candidature.
Les questions à un million de dollars sont les suivantes : par quelle magie l’ex sénateur a été libéré juste avant les dépôts de candidatures ? ; par quelle magie un régime soit-disant dictatorial lui a permis de descendre à Kinshasa avec une si immense foule pour l’accueillir ?
Nous avons perdu ces 5 dernières années.
Alors préparons les échéances prochaines tout en priant le ciel d’éloigner cette fois-ci les traîtres, les comédiens et les non patriotes, qui sont autant dans la coalition au pouvoir que dans l’opposition.
Question : L’ancien ministre de la santé publique et l’ancien ministre provincial des finances de la ville de Kinshasa sont visés par des poursuites judiciaires. Vous êtes convaincue que ces signaux marquent la volonté des actuelles autorités congolaises à mettre fin à l’impunité ?
Réponse : Dans un vrai État de droit, les poursuites ciblées ne devraient plus exister.
Un rapport général devrait être fait sur tous les ministres sortants car, selon le magasine africain Afro Baromètre 1999-2019, la RDC arrive en premier sur les 35 pays africains sélectionnés en terme de corruption avec un taux de 85%.
Les poursuites contre le docteur auraient été crédibles si plus de personnes étaient interpellées. Faisons attention à l’instrumentation de la justice pour des règlements de comptes.
Question : L’ANR a instruit l’inspecteur général des finances afin que celui-ci ouvre un Audit sur l’utilisation de l’argent du trésor public depuis le mois de Janvier 2019 par le gouvernement précédent. D’après vous, quel sera l’impact d’une telle décision dans l’avenir ?
Réponse : Je ne crois pas que nos services de renseignement soient habilités ni suffisamment équipée pour ça.
Et je crains également fort que ceux qui auront les moyens de corrompre puisse s’en sortir.
Pour ma part, je crois que de nouvelles bases de contrôles doivent être mises en place pour le suivi et l’accompagnement de la nouvelle équipe, laquelle doit commencer par déclarer ses biens comme le prévoit l’article 99 de notre Constitution.
Question : Vous avez toujours apprécié le travail abbatu par la rédaction de LIBERTÉ PLUS. Est-ce que vous gardez le même langage jusqu’à ce jour ?
Réponse : C’est toujours un plaisir de répondre aux questions de Liberté plus, vu leurs niveaux et qualités.
Cependant, comme pour tous les médias en RDC, vous devriez sortir de la tendance pro-pouvoir d’un côté, pro-opposition de l’autre, et informer les congolais(e)s d’une façon impartiale, professionnelle et patriotique. Merci encore cher Liberté plus.
Et comme d’habitude, la RDC n’a que nous les congolais(e)s pour en prendre soin ; aimons-nous et, TOLINGACONGO !
Propos recueillis par LIBERTÉ PLUS@ 30 août 2019

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